La photographe Jacquie Maria Wessels fera bientôt don au Rijksmuseum d’un certain nombre de photographies de sa série Garage Stills. Pour la rubrique Spotlight’s on : de l’Atelier Néerlandais, nous lui avons téléphoné.
Qu’est-ce que c’est exactement, Garage Stills ?
Des natures mortes pittoresques réalisées dans des garages traditionnels de réparation de voitures avec les attributs trouvés sur place. Puis photographiées de manière analogique. J’ai eu l’idée de ce projet lorsque j’ai conduit de temps à autre ma propre voiture dans un garage. Au début, il appartenait à un garagiste bien ordonné, mais lorsqu’il a cédé son affaire à son beau-frère, le garage est devenu plus desordonné à chaque visite. Je me suis surprise à me demander à quoi le garage allait ressembler à ma prochaine visite. Un jour, j’y ai fait remplacer un disque d’embrayage, et j’ai vu à quel point un tel disque était beau. Puis j’ai pensé qu’il serait bien de le photographier dans son environnement naturel : le garage.
Comment cela fonctionne-t-il ?
Quand je trouve un garage qui me convient, je demande si je peux y entrer et le photographier. J’emporte avec moi mon équipement, caméra analogique et lumière, et je pars à la recherche d’éléments mystérieux aux formes et couleurs étonnantes pour construire ma nature morte sur place. Parfois, j’y passe une journée entière. Le garage est toujours un monde d’hommes, où je suis, en tant que femme, un peu l’intrus. J’étais étonnée de constater qu’il y a souvent des hommes dans le garage qui ne viennent pas du tout pour faire réviser leur voiture, mais juste pour prendre un café. Ces garages à l’ancienne disparaissent peu à peu, car la voiture moderne est de plus en plus un ordinateur qui est entretenue dans des espaces stériles et ordonnés. Je fais toujours les photos sur pellicule 6×6 et les tirages sont imprimés de manière analogique. Ce savoir-faire artisanal qui disparaît correspond à la réparation à l’ancienne d’une voiture.
Les Garage Stills ont été réalisés dans le monde entier pour inclure des textures culturelles e.a. en Turquie, au Cambodge, en Russie, en Pologne, au Maroc, en Italie, à Cuba, au Sri Lanka, en Afrique du Sud et à Tokyo. À Tokyo, j’ai remarqué que c’est une ville qui a son propre jeu de couleurs. Dans les photos que j’ai faites dans un des garages de cette ville, je me suis assurée que les couleurs de la ville se reflétaient dans ces images. Dans des objets différents, mais toujours dans les mêmes couleurs.
Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
Bien sûr, c’est une époque un peu étrange, parce que vous ne pouvez pas voyager et que vous devez rester à l’intérieur. Donc maintenant, je ne frappe plus aux portes des garagistes. Je travaille sur une série intitulée Fringe Nature, qui traite de l’intersection entre la nature et la ville, et qui me ramène souvent de nouveau du coté de ces garages. Vous pouvez penser à une rose errante qui fleurit près d’un lampadaire dans une zone industrielle par exemple. J’ai toujours beaucoup voyagé, dans ma mémoire je peux heureusement aller dans d’autres endroits. Et je passe plus de temps à dessiner maintenant.
Quel est votre lien avec la ville de Paris ?
J’y allais souvent avant la crise sanitaire, et j’aimerais bien y retourner maintenant. Je m’y sens toujours chez moi. Pensez à l’immensité de la place de la Concorde. C’est une vraie joie. Paris Photo : c’est là que j’ai rencontré les conservateurs du Rijksmuseum, qui vont maintenant inclure un certain nombre de mes Garage Stills dans leur collection. Cela m’a vraiment surprise, parce que c’est un grand honneur de faire partie de la collection du Rijksmuseum. D’ailleurs, je n’ai pas photographié de garages à Paris, mais plutôt des photos poétiques qui symbolisent des souvenirs.